... Au vocabulaire à la mode
J’avais écrit, en 2010, un article sur le vocabulaire "
à" la mode, que j’avais intitulé : "
Ces expressions à la mode qui nous agacent un peu…" et que je reprendrai en partie ici.
Auparavant, en mise-en-bouche, un petit texte sur le vocabulaire "
de" la mode… (lol) !
"
Lors de la fashion-week, mon amie Nadine et moi décidâmes d’aller shopper.
Il n’était pas question que les fashionatas que nous sommes manquent cet événement qui faisait le buzz ni de faire un fashion faux-pas pour cette grande occasion !
Aussi, nous étions-nous vêtues avec soin.
Dress-code casual pour les deux : un top basic pour moi sur un legging, le tout accompagné de compensées.
Chino et perfecto pour Nadine, un total look réussi, légèrement vintage ; elle avait remplacé ses habituelles babies par des slippers plus tendance, le tout accompagné de son it-bag, bien sûr !
Question coiffure, j’avais délaissé mon look curly pour un brushing wavy avec finition one-shoulder.
Nadine avait gardé sa coiffure straight free, très top !
En ce qui concerne le maquillage, nous avions opté pour un ensemble nude, avec tout de même une touche glossy pour les lèvres, du meilleur effet glamour. Pas de smokey eyes pour la circonstance…
Un moment très réussi, nous avons flashé, elle pour une jupe crayon très ladylike, moi pour des low boots.
Et pourtant, je m'étais promis : "No buy" !"
Vous trouverez ci-dessous un petit lexique...
Petit lexique des termes à la mode du domaine de la mode..
Fashion-week : la semaine de la mode
Shopper : faire du shopping
Fashionatas : passionnées de mode
Buzz : Evénement
Fashion faux-pas : faute de goût en rapport avec la mode
Dress-code : style de vêtements
Casual : décontracté
Top : petit haut échancré, débardeur
Basic : vêtement de base, fondamental
Legging : caleçon long
Compensées : désigne des chaussures à semelles épaisses
Chino : pantalon assez large en serge de coton
Perfecto : blouson de cuir avec poches et fermetures éclair, style motard
Total look : l'ensemble de l'apparence, la façon de s'habiller de haut en bas
Vintage : rétro
Babies : sandales plates à brides, qui ressemblent aux sandalettes des bébés
Slippers : chaussures confortables, style chaussons
Tendance : mode
It-bag : le sac du moment, celui qu'il faut avoir
Look curly : coiffure bouclée
Brushing wavy : coiffure lissée avec vagues sur les pointes des cheveux
One-shoulder : chevelure ramenée sur un côté, tombant sur une seule épaule
Straight free : cheveux naturellement lisses
Top : maximum, le mieux
Nude : maquillage naturel, qui se rapproche du teint de a peau, qui doit passer inaperçu
Glossy : brillant, se rapporte essentiellement à un rouge à lèvres brillant et transparent
Glamour : qui possède un charme sensuel, sexy, mignon
Smokey eyes : yeux charbonneux
Flashé : craqué
Jupe crayon : jupe droite, moulante, qui met les courbes en valeur
Ladylike : distingué, digne d'une dame
Low boots : bottes basses, qui couvrent seulement la cheville
No buy ! : pas d’achats (prévus) !
Mon expression "préférée", car elle frise le ridicule, est sans conteste "fashion faux-pas", qui me fait rire chaque fois que je l'entends ou que je la lis (car je l'entends et je la lis !).
Mais, comme il n'y a pas que le domaine de la mode qui fasse l'objet d'un vocabulaire "mode", voici le billet que j'avais publié sur "Les Peintures de Norma C" au sujet de ces expressions "à la mode" qui ont tendance à m'amuser parfois, mais aussi, d'autres fois, à m'irriter quelque peu...
J’avais alors participé à une série d’entretiens de recrutement pour un poste de la fonction publique (catégorie A), poste à lourdes responsabilités et à enjeux politiques et institutionnels importants.
Loin de moi l’idée de critiquer les candidats, qui affrontaient tous avec énormément de courage cette épreuve ô combien inconfortable, mais j’avais été sidérée par l’emploi constant de ce vocabulaire "mode", que l’on aurait pas attendu dans "l’orthodoxie" d’une telle situation.
Les "c’est clair", "ya pas photo", "j’y crois pas", "c’est trop", et autres expressions aussi savoureuses ont bel et bien été prononcées...
Certes, on les entend partout, à la télé, à la radio, dans les commerces, au bureau ; même nos amis n’y échappent pas ! (et parfois nous-mêmes…).
Je n'ai pas pu résister à en présenter quelques unes, mais peut-être en connaissez-vous d'autres ?"
C'est clair : réponse qui sous entend qu’on a déjà réfléchi à la question et qu’on ne se contente pas d’un oui ; cette expression vient ponctuer chaque phrase de l’interlocuteur.
Y’a pas photo : il n’y a pas de doute, voire de confusion, possible.
De chez… (Exemple : bête de chez bête) : exprime un superlatif, ou un comble.
Être trop : exprime un superlatif.
Que du bonheur : exprime la joie, le contentement, face à un événement qui est, bêtement, jugé "parfait".
Avoir la banane : sourire largement, être content.
Absolument (ou "tout à fait") : oui.
J’hallucine : je n’arrive pas à y croire.
LOL : mort de rire.
On n’est pas trop de deux : la tâche est difficile, heureusement qu’on est deux pour l’effectuer.
Être à l’ouest : être à côté de la plaque, dans un état anormal d’inattention, avoir la tête ailleurs..
J’y crois pas : exprime un grand étonnement.
La cerise sur le gâteau : le plus, le supplément.
Moyen : nul.
Ça me gave : ça m’ennuie, ça "m’emmerde".
Grave : s’applique à un individu qui a fait quelque chose qu’on juge négativement ; peut également signifier beaucoup : "il m’énerve grave".
Ya un moment où il faut arrêter : expression qui dit bien ce qu’elle veut dire...
Pas de soucis : expression dite systématiquement, qui veut dire : il n’y a aucun problème. On peut dire également, dans le sens opposé : il y a un souci ?
Boosté : vitaminé, surexcité, hyperactif, très motivé.
Y’s la pète : il est orgueilleux, il pense pouvoir tout faire, il n’a plus de limites...
Mais pas que : mais pas seulement.
Tu m'étonnes ! : synonyme de "c'est clair", en fait "tu ne m'étonnes pas", une antiphrase, donc
Juste : vraiment (c'est juste merveilleux !)
Pour continuer à sourire, voici un dialogue, à propos de mes amis félins, qui illustre ces expressions…
- C’est vraiment Kali, la plus marrante de tous les chats qu’on connaît !
- C’est clair, y’a pas photo !
- Elle est trop de chez trop !
- Tu m'étonnes, avec elle, c’est que du bonheur…
- Regarde, on dirait qu’elle a la banane !
- Absolument !
- J’hallucine, elle vient de monter à l’arbre, LOL !
- On ne va pas être trop de deux pour la faire descendre. Elle est complètement à l’ouest de grimper si haut !
- Regarde le Charlie qui la poursuit !
- J’y crois pas !
- C’est la cerise sur le gâteau, il risque de la faire tomber !
- Y a des jours, il est vraiment moyen, ça me gave de le voir faire ça !
- Ouais, il est grave ce chat !
- Non, mais y a un moment où faut arrêter quoi !
- Allez, pas de soucis, il va redescendre !
- Oh, il est vraiment boosté de chez boosté, ce Charlie !
- Y’s la pète, là !..
Et, pour terminer plus sérieusement, quelques éléments d'analyse.
La mode n’est pas une chose seulement "légère", c’est surtout un phénomène social général.
Le sens de la mode est révélé par la psychologie sociale. Elle est ainsi, sous toutes ses formes, une "expression sociale".
Sa part de liberté a son origine dans ce que la mode est une formation névrotique, comme le rêve ou l’art. Elle est l’expression du refoulé (sexualité, irrationnel, fantasmes et grandes images collectives...) et par là traduit l’inconscient culturel collectif d'une époque.
L’un des paramètres explicatifs des phénomènes de mode, langagière ou autre - vestimentaire par exemple - réside dans l’imitation, qui peut engendrer des chaînes de contagion imitative qui sont le fondement de la mode elle-même.
Ce que "dit" le "lanceur de mode", les autres veulent le "dire"…
La marque du groupe est aussi un paramètre important : le groupe d’appartenance va imposer ses "marques", ses "emblèmes langagiers" ; son influence est d’autant plus forte que l’identité personnelle est mal établie, d’où son importance à l’adolescence : on s’habille comme un "jeune", on parle comme un "jeune"…
Ajoutons à cela une composante "quartier" et nous nous trouvons avec des modes langagières particulières car le langage est aussi un classificateur social. Tout comme le groupe impose parfois son uniforme, il impose aussi son langage et ses expressions, autant d’emblèmes d’appartenance…
Il reste à déterminer l’utilisation sociale de la mode langagière, le sens que font jouer les sociétés à ce système de renouvellement.
Les sociétés traditionnelles ou conservatrices, attachées aux valeurs de répétition et de stabilité, ne favorisent jamais la mode langagière, l’interdisent parfois et la freinent toujours au maximum. Au contraire les démocraties et les sociétés de progrès ont toujours favorisé le jeu social de la mode langagière.
La mode est le jeu symbolique où les sociétés modernes rejouent jusqu’au vertige ce qui constitue l’essentiel de leur système. Voilà son sens profond.
Le problème avec la mode, langagière ou autre, c’est qu’une fois qu’on l’a installée on ne peut plus s’en passer. C’est un jeu gratuit qui n’a d’autre but qu’elle même. Aussi n’échappe-t-on jamais à la mode...
D’où l’extension de ces expressions "mode" quasiment à toutes les tranches d’âge et à tous les milieux sociaux, et au domaine de la mode, en particulier !
La mode, on peut être pour ou contre, mais pas en dehors. Toute anti-mode est une mode. C’est en se révoltant contre la mode qu’on lui obéit le mieux, puisque la logique de son système est le renouvellement perpétuel. Elle ne vit que de la contestation et s’enrichit des "modes de dérision"...
Il convient donc de considérer la mode comme un phénomène social qui peut désormais s’appliquer à n’importe quoi.
Et il faut la définir en conséquence.
La mode langagière est formée par la superposition de quatre degrés au moins :
- la diffusion soudaine d’une expression ;
- sans justification utilitaire valable (on avait déjà des expressions synonymes) ;
- éphémère ;
- avec un cycle de renouvellement…
D’une façon générale, la mode est le désespoir que rien ne dure et la jouissance que tout reviendra.
C’est "
la frivolité de la mort et la modernité du déjà-vu" (Baudrillard)."
A vous maintenant, que pensez-vous de ce "langage de la mode" et de ce "langage à la mode" ?
Très bonne semaine à toutes !